vendredi 13 janvier 2012

Étiennette GASSER, « Der Blaue Reiter »



DER BLAUE REITER
Munich est en pleine effervescence artistique au début du xxe siècle. Déjà, en 1892, des artistes se séparaient de l'Association munichoise et formaient la première sécession d'Allemagne. La revue Jugend, organe du Jugendstil, ou Art nouveau, ferment de rénovation, paraît en 1896. La même année voit l'arrivée des Russes Kandinsky, Jawlensky et Marianne von Werefkin. Kandinsky ouvre une école d'art en 1902 et préside le groupe « La Phalange », se situant rapidement comme une des personnalités marquantes de la fameuse cité des arts. En 1904, tous les mouvements avancés se fédèrent en une première association. Des expositions de Cézanne, de Van Gogh, de Gauguin, des néo-impressionnistes sont suivies de celles des nabis, de Matisse, de l'art oriental. Von Tschudi, nommé directeur des musées de l'État bavarois en 1909, contribue à donner à Munich une place prépondérante dans le mouvement moderne. Une nouvelle fédération d'artistes « avancés » se forme, la Neue KunstlerVereinigung (N.K.V.). Kandinsky en est le président. Les expositions de la N.K.V. sont animées d'un esprit d'internationalisme culturel analogue à celui des Indépendants à Paris. Son programme, rédigé par Kandinsky et Jawlensky, est une profession de foi, la croyance esthétique en un éclectisme qui embrasse les productions les plus archaïques et les plus modernes. Mais, dans ce vaste groupement hétérogène, la majorité des peintres en reste à un mélange de fauvisme et de Jugendstil. Vers 1910, divers artistes, subissant l'attraction des idées de Kandinsky, forment un petit groupe, prélude de la scission d'où naîtra le Blaue Reiter, une des manifestations les plus importantes du dynamisme propre au génie allemand.
Le cercle du Blaue Reiter
Idée-force plus que groupe, Der Blaue Reiter, ou Le Cavalier bleu, n'est pas un mouvement cohérent et organisé comme la Brücke à Dresde. Il est l'aboutissement d'une évolution qui trouve son origine dans un véritable confluent d'idées et d'expériences européennes. Le refus du Jugement dernier de Kandinsky par le jury d'exposition de la N.K.V. met en évidence des dissentiments personnels et esthétiques. Deux camps se forment, l'un autour de Kandinsky, l'autre autour d'Erbslöh et Kanoldt. Kandinsky démissionne. Franz Marc le suit avec Kubin et Münter. Jawlensky et Werefkin tout en sympathisant avec leurs idées restent à la N.K.V. De façon tout à fait précise et concrète, le Blaue Reiter à sa naissance est constitué par les rédacteurs de l'Almanach, c'est-à-dire Kandinsky et Marc aidés de Macke, tous trois réunis, l'été et l'automne 1911, à Sindelsdorf où se trouve aussi Campendondek. Le Cavalier bleu est ainsi un cercle d'amis, ouvert. Le 11 décembre 1911, Kandinsky et Marc décident d'affirmer leur position par une exposition. Grâce à l'appui de Von Tschudi, elle a lieu à la galerie Tannhäuser, du 18 décembre 1911 au 1er janvier 1912, sous le titre « Der Blaue Reiter ». L'emblème provient tout naturellement de ces cavaliers et chevaux dont les deux amis sont obsédés et de leur commune prédilection pour le bleu, couleur signifiant une même aspiration vers le spirituel, comme Kandinsky l'explique dans le Kunstblatt XIV, 1931. Un de ses tableaux de 1903 porte déjà ce titre. Les peintres invités à l'exposition sont réunis autour du Douanier Rousseau : Delaunay, Kandinsky, Marc, Macke, Campendonk, les deux Burljuck, le compositeur et peintre Schönberg et quelques autres : Niestlé, Bloch, Elisabeth Epstein, Kahler. Sélection restreinte (quarante-trois numéros) mais pourtant significative, l'exposition a une importance historique et parcourt l'Allemagne. La seconde exposition s'ouvre le 12 février 1912 à la galerie Glotz à Munich, sous le titre « Noir et Blanc ». Consacrée à l'art graphique, elle a une portée plus large et réunit plusieurs centaines de dessins, gravures, aquarelles des premiers exposants, des membres de la Brücke, de Klee, Kubin, des cubistes Braque, Picasso, Derain, La Fresnaye, de Vlaminck, des Russes Malevitch, Larionov, Gontcharova, des Suisses, un Alsacien, Arp, des Allemands isolés, Morgner et Tappert. En 1912, le Blaue Reiter est invité à l'exposition internationale du Sonderbund de Cologne, et au Sturm en 1913, au premier Salon d'automne allemand, mais d'audience internationale, organisé par Walden. La guerre coupera l'élan du Cavalier bleu.
Doctrine
Le Blaue Reiter n'a ni programme, ni adhérents. Un accord tacite sur les problèmes de l'esprit et de l'art fonde l'union des intéressés. Un homme est en mesure de les formuler : Kandinsky. En 1910, il écrit Du spirituel dans l'art (édité à Munich en 1911) où il part d'une critique de la structure matérialiste du monde contemporain. Il voit la science transmuter la matière en symboles d'énergie, l'art de Matisse libérer la couleur de sa fonction de signifier les objets, chez Picasso, l'éclatement des formes. Autant de signes d'un « grand tournant ». Sa conclusion est celle d'un peintre qui identifie les voies du spirituel à des voies plastiques : « L'harmonie des couleurs et des formes doit être basée sur une seule chose, le contact efficace avec l'âme humaine. » La seule loi de l'artiste est « la nécessité intérieure ». Il est libre d'agir comme l'esprit le pousse, libre même d'abandonner les images de la nature et de donner pouvoir expressif aux formes et aux couleurs pures. Un sentiment religieux, implicitement chrétien, sous-tend cette conception où l'homme est en communication privilégiée avec le monde et les réalités transcendantes. Des notions de théosophie s'y mêlent. Le groupe lit Steiner et Hélène Blavatzki, il est préparé à voir le prodige de la révélation partout. Dans l'esprit de Marc, l'essence d'une image est son pouvoir de « surgir ailleurs ». Dès 1908-1909, Kandinsky sentait qu'il en viendrait à rejeter les apparences extérieures. Cette même année, il rencontre Worringer qui devient un des supporters de l'expressionnisme. Les livres de l'esthéticien : Abstraktion und Einfühlung (paru en 1907, la même année que L'Évolution créatrice de Bergson) et Die Formprobleme der Gothik (1909) exaltent l'intuition et montrent l'abstraction comme l'une des deux orientations possibles de l'activité créatrice, laquelle relève d'un sentiment d'appartenance et d'immanence à la toute-puissance cosmique : idées en relation avec celles de Kandinsky (1re aquarelle abstraite, 1910), et celle de Marc sur la vision de la nature en tant qu'expression d'une condition intérieure. L'amitié de Kandinsky et de Schönberg, vers 1909, est une autre constellation du « printemps héroïque » de Munich. La pulvérisation de l'univers tonal, amorcée en 1908, est parallèle à l'explosive destruction des images. Ni Kandinsky ni Schönberg ne renient l'impression de l'événement extérieur, mais ils la rangent parmi ces influences et prétextes que le génie intérieur doit valoriser. Contamination, engagement de la pensée vers des formes idéologiques également décelables dans l'épopée poétique. La Lumière nordique de Däubler (1910), Le Jeune Homme debout de Lembruck (1913). Les mêmes tendances à la dématérialisation s'y expriment.
C'est aux avant-gardes européennes que le Blaue Reiter fait appel pour ses deux expositions. Né d'une décision et d'un choix arbitraire, conscient de ses buts, il réunit, dans une fraternité généreuse, expressionnisme, cubisme, tendances abstraites. Sur la page du catalogue inaugural, une simple déclaration : « Nous ne cherchons pas à propager une forme précise ou particulière ; notre but est de montrer dans la variété des formes représentées comment le désir intérieur des artistes se réalise de multiples façons. » Une position est affirmée : il n'y a pas de question de forme, il faut envisager un contenu artistique. L'Almanach la confirme : « Le renouveau ne doit pas être formel, mais plutôt une renaissance de notre façon de penser », écrit Marc. Le point de vue des participants est tout à fait homogène. Parmi les cent quarante illustrations, des plus primitives productions aux plus modernes, les fixés sur verre bavarois, les dessins d'enfants, les gravures anciennes allemandes occupent une place privilégiée, œuvres d'« artistes purs ». Le mouvement antinaturaliste moderne est décrit dans toutes ses ramifications. Citons la description des méthodes de composition de Delaunay et l'article de Kandinsky Sur la question de la forme, où il conclut que l'art futur oscille entre la Grande Abstraction et le Grand Réalisme dont le Douanier est un étincelant témoignage. La tentative de synchronisme de musique et d'effets colorés du Prométhée de Scriabine est discutée par Schönberg, appuyée par Le Ton jaune de Kandinsky, exemple de son idée favorite d'« œuvre d'art totale », combinant pantomime, orchestration lumineuse colorée et musique. L'Almanach définit la situation de 1911, et prélude au développement qui culmine en 1912 et où se réalise « la construction intérieure mystique du monde » selon la romantique et paradoxale formulation de Marc appuyée par Macke qui voit la forme comme « l'expression de forces intérieures ». Cristal à facettes, le Blaue Reiter réfracte chaque individualité dans sa croissance : religiosité romantique et mystique de Marc ; vision poétique de Macke ; sensibilité de Klee : mysticisme russe de Jawlensky qu'aiguillonne la passion mystique de Kandinsky, elle-même freinée par sa stricte intelligence.
Quatre artistes liés au Blaue Reiter
Franz Marc
Arrivé à la peinture après des études de théologie et de philologie, Marc étudie à Munich, se lie avec le peintre animalier Niestlé, dont l'influence est en accord avec son amour des animaux. Ceux-ci, il les sculpte, les peint, les traitant tour à tour selon les formules du Jugendstil, de l'impressionnisme connu à Paris en 1903, du néo-impressionnisme découvert, en 1906, lors d'un second voyage. L'exemple de Van Gogh et de Gauguin, celui de l'œuvre de Kandinsky l'amènent progressivement à la conquête de sa première manière originale (Chevaux rouges – Chevaux bleus, 1911). Son naturisme puissant s'exprime à travers un schéma fondé sur la courbe, avant qu'il ne parvienne à la pleine possession de ses moyens ; il s'appuie sur l'expérience cubiste, sur l'orphisme de Delaunay, et sur le futurisme. Dès lors, une construction fortement accusée, rythmée par les lignes-forces futuristes, un chromatisme violent mais aussi une matière transparente dans l'éclat de la lumière affirment la maîtrise d'un tempérament généreux. La guerre des Balkans (1912-1913) et le pressentiment de la Première Guerre mondiale marquent de leur atmosphère d'angoisse une œuvre où se révèle la joie d'une plénitude artistique atteinte. Parvenu à la peinture inobjective en 1914, Marc n'a jamais entièrement abandonné la figuration. Dans son carnet d'esquisses du front, dix seulement sur trente-cinq sont abstraites. Sa mort prématurée à Verdun, le 5 mars 1916, ne peut laisser prévoir s'il aurait, comme Klee, gardé les deux modes d'expression.
August Macke
Élève de Corinth, en 1908, à Berlin, deux séjours à Paris (1907-1908) lui font connaître l'impressionnisme comme en témoignent alors ses œuvres. Il se lie d'amitié avec Marc et en 1911 séjourne chez Kandinsky à Murnau. 1912 est une date capitale, celle de ses contacts personnels avec Delaunay à Paris en compagnie de Marc. Dès lors il organise en une construction légère d'une couleur lumineuse les éléments structurels imposés par Cézanne. Au cours de ses deux dernières années créatrices (1913 au lac de Thoune, 1914 à Kairouan avec Klee et Moilliet), Macke trouve l'équilibre entre l'arrangement formel et la sensation. Élément modéré du Blaue Reiter, peintre de la ville moderne, de ses vitrines, de ses parcs et promenades, il les peint avec un lyrisme très personnel. Avant sa mort, en septembre 1914, sur le front de Champagne, Macke parvient à une abstraction apparentée aux contrastes de formes de Léger, mais d'un chromatisme clair. Comme pour Marc, la question se pose de l'évolution possible d'une œuvre trop tôt interrompue.
Alexei von Jawlensky
Lié spirituellement au Blaue Reiter, arrivé en 1896 à Munich, où il est un des fondateurs de la N.K.V., Jawlensky connaît les méthodes et principes esthétiques de l'école de Pont-Aven en Bretagne où il peint, en 1905, « ce que je sens et non simplement ce que je vois ». Gauguin, Van Gogh, Matisse, Kandinsky, tels sont ses points de départ. Natures mortes, paysages et surtout « têtes » sont les thèmes de ce fauve dont la couleur montée, brillante, posée en larges touches plates et cernée de forts contours, a une signification symbolique. Entre la Jeune Fille aux pivoines (1909) et la Tête de jeune fille (1913) se situe une évolution vers un mysticisme exalté qui donne au visage humain un pouvoir symbolique comparable aux portraits du Fayoum ou aux icônes byzantines. Si Jawlensky ne suivit pas Kandinsky sur la voie de l'abstraction au temps du Blaue Reiter, les années de guerre devaient l'y conduire à travers les Variations sur un paysage de Suisse et une série de « têtes » mystiques. Russe, il réalise des icônes modernes.
Alfred Kubin
Kandinsky le désigne avec Maeterlinck, Scriabine et quelques autres comme l'un des « voyants », des « prophètes » de notre temps. Hormis quelques aquarelles et gouaches, Kubin a donné une œuvre exclusivement graphique : dessins, lithos, illustrations de livres (Tristan de T. Mann ; Le Double de Dostoïevski ; Poe ; Barbey d'Aurevilly). Kubin exprime son propre monde plein de fantômes et de démons, un monde de cauchemars et de névrose. Son graphisme se caractérise par l'absence de centre de composition. Un fil d'encre qui saisit l'imagination du spectateur tisse ce style psychographik que cherche Kubin, capable de transcrire « comme un instrument météorologique très sensible les moindres oscillations de mon climat vital » (meiner Lebensstimmung). Graphisme sauveur qui exprime et délivre. Kubin témoigne de toute une zone de culture germanique obsédée par la conception d'un monde autre et qui serait effrayant. Ce monde, Kubin le révèle par un coup de génie prophétique dans « un écrit véritablement possédé du démon, démonisé », dit-il, son seul roman : L'Autre Côté. En quatre mois, il se débarrasse du songe dont il est obsédé et qu'il annonce comme une apocalypse. Dans l'Empire du rêve où vit une étrange population aux yeux bleus, le héros se heurte aux obstacles, aux secrets, à l'inexplicable, à la tragédie. Kubin, dans le ciel serein de 1908, annonce l'univers de Kafka dont l'œuvre le suit de quelques années, Kafka qu'il a connu, illustré. Il annonce et dénonce, pour nous qui connaissons les choses et leur accomplissement, une idée fondée en réalité. Dans l'hypothétique rêverie de Kubin comme dans l'opération créatrice de Kandinsky ou de Klee, il s'agit d'un irrépressible besoin de passer de l'âme à l'œuvre, d'accomplir le salto mortale qui, à mieux dire, est un salto vitale, un bond libérateur.
Le terme « expressionniste » n'a pas fini d'être controversé. P. Selz, B. Myers rangent, comme jadis Walden, les artistes du Blaue Reiter dans l'expressionnisme. B. Dorival, faisant observer l'influence de Delaunay sur Macke et Marc, conteste cette position qui « confond sous le nom générique de l'expressionnisme la peinture des membres de la Brücke et celle de Kandinsky et Jawlensky avec l'art tellement autre que Marc, Macke, Campendonk pratiquent de 1912 à 1914 ». Observation pertinente, surtout à propos de Macke, mais on souhaiterait voir cerner de plus près la notion d'expressionnisme et ses variations. Le cas de Marc est problématique en effet. À côté d'œuvres marquées de la recherche d'équilibre et des couleurs claires de Delaunay, d'un certain ordre latin, d'autres sont inspirées par un romantisme sombre que la sensibilité du peintre aux événements exacerbe. Les moyens formels sont tout entiers soumis au besoin d'exprimer un sentiment. Contrairement à une opinion trop souvent émise, tout n'est pas forcément, dans l'expressionnisme, exaltation incontrôlée.
Étiennette GASSER, docteur en sociologie. « Der Blaue Reiter », Encyclopaedia Universalis
Bibliographie
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